SIS DIES CORRENTS / THE ODD-JOB MEN
6DC01 - Générique Début
6DC02 - Moha Fenêtre
6DC03 - Trio 2cv
6DC04 - Libido
6DC05 - Moha Velo
6DC06 - Trio 2cv Again
6DC07 - Interrupteur
6DC08 - Jumelles
6DC09 - Balcon
6DC10 - Gamelle Balcon
6DC11 - Arrivée Photographe
6DC12 - Boutiful
6DC13 - Séance Photo 1
6DC14 - Séance Photo 2
6DC15 - Valero Gros
6DC16 - Cuisines 1
6DC17 - Cuisines 2
6DC18 - Sommeil
6DC19 - Valse des Robots
6DC20 - All the People
6DC21 - Valero Photos
6DC22 - Vandamme
6DC23 - Générique Fin
2021
Un film de Neus Ballús
Produit par Distinto Films / El Kinògraf / Slot Machine
(Miriam PORTÉ / Neus BALLÚS / Carine LEBLANC)
Musique composée par René-Marc BINI © Altynaï
Jean-Paul SIRE : bandoneon
Guillaume BOUTHIÉ : contrebasse
André MALLAU : drums
Gérard MELOUX : bouzouki
René-Marc BINI : piano, guitar, ukulele, sanza, percussions
Enregistré aux studios de l’IDEM (Le Soler – 66) par Sylvain PHILIPON
Mixé par Philippe AVRIL aux studios TEX AVRIL (Ferber)
L’HISTOIRE
“Pour valider son contrat d’essai d’une semaine, un jeune plombier marocain doit composer avec des collègues et des clients tout aussi excentriques”, traduction de ce que nous pouvons lire sur le site de Distinto Films. Car une fois n’est pas coutume, on ne trouve rien en français, et je ne m’en plains nullement. C’est bien un film catalan, de par son esprit et sa tonalité, entièrement tourné à Barcelone. Évidemment, le film est beaucoup plus riche que ce petit ‘pitch’ (comme on dit chez ceux qui ont peur de rater le train fantôme de la modernité), il déborde de toutes parts : on aurait pu le présenter de mille autres façons. Un pur exercice de funambulisme cinématographique. Pour comprendre, il faut s’intéresser à celle qui l’a conçu et mis au monde : Neus Ballús.
NEUS
Je vis mon ‘métier’ comme une succession de rencontres. Tout le reste en découle. Quand on me parle de technique de composition pour l’image, de styles ou de catégories de musiques, d’expérience, j’avoue que je ne vois pas clairement de quoi il s’agit. C’est la pure vérité. En tout cas, si les critères en questions existent, ce n’est que dans l’oeil, l’oreille et surtout le cerveau, de ceux qui regardent. Quand je travaille, je ne pense à aucune technique, aucune méthode, aucune catégorisation, aucune référence. J’essaye seulement d’être avec la réalisatrice (tiens, je vais utiliser l’écriture exclusive féminine ). C’est elle qui me conduit vers l’histoire qu’elle raconte, comme on fait visiter un appartement. J’essaye juste d’être complètement vierge quand je débarque. C’est pas si facile, mais maintenant je crois que j’y arrive. C’est peut-être ça, la fameuse ‘expérience’.
Ce sont la personnalité et surtout les qualités humaines de la personne en question qui vont être déterminantes. Et, subséquemment, des affinités que nous découvrirons, ou que nous construirons. Car oui, faire la musique d’un film est un travail qui se fait à deux, avec parfois une troisième entité : une productrice par exemple, une monteuse aussi, liste non exhaustive bien sûr.
C’est la productrice Carine Leblanc qui m’a conduit à Neus et à ce film. Carine m’avait déjà fait partager l’expérience d’une série Arte sur la Guerre de 30 ans. Ça ne s’est pas bien passé pour des raisons semble-t-il indépendantes de mon travail. Mais nous avons gardé le lien. La preuve. Sis Dies Corrents est principalement produit par une boite barcelonaise, Distinto Films, dirigée par Miriam Porté, ainsi que par Neus elle-même (El Kinògraf) et donc Carine Leblanc (Slot Machine). La rencontre avec Neus fut tout de suite chaleureuse et enthousiaste (ingrédient de base absolument indispensable).
J’ai bien sûr regardé ses films, et j’ai adoré son premier long métrage, La Plaga, filmé dans les plaines catalanes du nord de Barcelone, pendant un été aride. Elle a une façon de travailler très atypique : elle raconte la vraie histoire des personnes que l’on voit. Après les avoir choisis, elle les fait travailler pendant de longs mois pour devenir des comédiens, puis elle met en scène leur propre histoire. Ça parait très casse gueule, mais elle sait faire ça avec beaucoup de maîtrise et de finesse.
J’ai toujours adoré les gens qui ont des univers très personnels, et qui développent les façons de travailler qui vont avec. Je crois que c’est aussi mon cas, depuis le début. Tout ce qui sent le ‘formattage’ me rebute, me déçoit, m’ennuie, me navre même !
Sis Dies Corrents est donc l’histoire de 3 plombiers-électriciens qui sont plombiers et électriciens, et qui sont devenus des acteurs. Et franchement, ils sont devenus de très bons acteurs si on en juge par le résultat. Le premier avantage est que tout ce qu’on les voit faire sonne juste, la gestuelle de leur métier en premier lieu. Rien de pire que des acteurs qui semblent ne pas savoir empoigner une visseuse, ou un tournevis, pour raconter ce genre d’histoire. C’est comme les acteurs qui jouent du piano dans les films : souvent ils se contorsionnent de façon ridicule. Mais ce n’est pas que de leur faute ! (notez que je suis revenu au masculin 🙂 ). Le metteur en scène doit s’en apercevoir.
Au gré de leur travail, ils se retrouvent mêlés à la vie quotidienne de ceux chez qui ils interviennent, une façon de visiter quelques strates ‘sociales’ de Barcelone. Il y a des moments très drôles, et d’autres touchants et profonds. Immigration, intégration, racisme, inégalités sociales, solitudes… sont balayés par l’amour de la vie, la drôlerie des situations, les amitiés qui se forgent peu à peu sans que personne ne les ait vues venir. Chapeau à toi Neus d’avoir réussi ce pari très délicat. J’ai été heureux de monter sur ton embarcation.
MUSIQUE !
Pour une fois, l’enregistrement aussi a été catalan, puisqu’également j’y vis, mais en France cette fois. Rencontre de Sylvain Philipon qui enseigne dans une chouette école d’audiovisuel de Perpignan, l’Idem. Il a monté un studio musique impressionnant sur place. Je lui explique le projet, il m’aide à trouver des musiciens locaux. Globalement ça se passe bien, même s’il y a quelque erreur de casting. Il faut avouer aussi qu’enregistrer à 4 ou 5 ensemble sans répéter auparavant, c’est quand même réservé à des musiciens de très haute qualité. Le droit à l’erreur est très limité si on veut qu’il y ait quelque chose ‘sur la bande’ comme on dit encore ! Soyons clair : quand ça ne roule pas comme je voudrais, je ne suis jamais désagréable avec le musicien en question. Je considère que je l’ai mal choisi, ou que je n’ai pas assez bien expliqué l’exigence à la personne qui l’a choisi pour moi. Il faudrait vraiment que le musicien fasse du mauvais esprit manifeste. Ça ne m’est arrivé qu’une ou deux fois, avec certains musiciens de séance classiques, qui étaient mal drivés par le régisseur. C’était il y a très longtemps. Dans ce cas, quand je tombe sur une tête de con, je deviens vraiment cassant, ça ne rigole plus.
Mais là ça rigole. Bandoneon ou accordeon, piano ou rhodes, contrebasse, batterie, guires ou bouzouki, voilà le menu. Il y a aussi pas mal de programmations, budget oblige. Et puis, cet enregistrement était censé n’être que des bases que je modifierais par la suite. Ce que je fis. Bilan musical, outre Sylvain, deux belles rencontres : Jean-Paul Sire au bandonéon, et Guillaume Bouthié, contrebassiste et aussi facteur-accordeur de piano, qui habite à 2 pas de chez moi. Que du bon !
Finalisation de la musique avec un passage pour mixer à Ferber, chez Philippe Avril. Je ressors content, comme à chaque fois !
On a travaillé longtemps avec Neus. On a parlé le même langage, du début à la fin. Ça c’est vraiment rare avec quelqu’un qu’on ne connaissait pas auparavant. De la chance peut-être. Mais pas seulement. C’est Carine Leblanc, qui nous connaissait tous deux, qui a parié que ça marcherait. Merci Carine !